Chateau de Clermont : Lieu des Festivités du BA
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Chateau de Clermont : Lieu des Festivités du BA

Lieu de fêtes du Bourbonnais-Auvergne et de Réunions du Comité des Fêtes ducal du BA
 
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 [Concours de Contes] Vlaams de Thiers

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Patience

Patience


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MessageSujet: [Concours de Contes] Vlaams de Thiers   [Concours de Contes] Vlaams de Thiers EmptySam 30 Déc - 0:39

Noël amena un froid très vif, le vent du nord faisait tressaillir les arbres jusqu’aux racines et de brusques foucades les déportaient violemment de droite puis de gauche. Une brume violette flottait comme un voile sur la ville encore endormie et seules quelques lumières éparses perdues dans l’entassement roussâtre des toitures lui donnaient un semblant de vie. De temps à autre, des paquets de neige glissaient des toits et dégringolaient à travers les arbres avec un bruit soyeux.
Une grande tour en bois, qui gardait la porte nord, détachait sa silhouette de la masse blafarde de la ville. De son poste de surveillance, le garde de faction ce jour là distingua, a travers la forêt, la route, un curieux équipage qui se dirigeait vers la ville
Il y avait un homme, une femme et un petit enfant. Ils cheminaient sur la route enneigée. Les masses sombres de sapins alternaient avec les tapis blancs étalés sur les flancs de coteaux. Ils cheminaient, c’est-à-dire que l’homme marchait devant, suivi d’un mulet attelé à une roulotte. A la fenêtre de la voiture une femme montrait un visage jeune qu’encadrait une étoffe voyante, comme aiment à en porter les gitanes. Et si on prenait la peine de s’approcher davantage, on pouvait découvrir, contre la joue maternelle, la joue d’un tout petit enfant.
- José, cria-t-elle, quel pays de solitude et de froid ! Arrêtons-nous au prochain village ! Allons-nous passer Noël dans un désert ? Il faut des présences humaines pour avoir le cœur au chaud !
- Maria, cria-t-il, je vois un clocher là-bas dans le creux de la vallée. Si notre bourricot veut bien y mettre du sien, nous y serons bientôt.
Quand ils se furent arrêtés sous le platane près de l’église, la femme sortit, heureuse de se dégourdir les jambes et de montrer à son petit enfant comment est fait un village chrétien : une église avec des maisons tout autour. Et aussi un garde, ce qu’elle avait omis de dire. Comme pour s’excuser de l’oubli, elle offrit son plus charmant sourire à l’homme important qui arrivait. L’homme avait un casque, une armure légère, une hallebarde, et une grosse voix qui fit sursauter Maria et pleurer l’enfant.
- N’avez-vous pas lu l’écriteau, vous autres ? Défense aux nomades de stationner sur le territoire de la commune ! Allons, déguerpissez, et tout de suite !
- Monsieur le garde, fit l’homme assez décontenancé, c’est vrai. Mais le soir tombe et nous ne connaissons pas de place où nous installer.
- Quoi, le pays n’est pas assez grand pour vous ?
- D’un geste large, il avait désigné la montagne, la plaine, les champs, la forêt, comme pour dire : « Tout cela pour vous ; nous ici nous restons entre nous ! »
- Monsieur, dit la femme à son tour, nous sommes des gens honnêtes et des chrétiens. Noël, ça se fête ensemble, le cœur au chaud autour du même foyer. L’église que voici nous parle de Celui qui est né cette nuit-ci.
- Allez-vous en !
- Quoi, pas plus de place pour nous parmi les braves gens qu’il n’y en eut pour Lui quand il vint sur la terre ?
- Bonne femme, vous prenez-vous pour la sainte famille , Allez passer la nuit où vous voudrez, mais pas ici. Je suis la loi, moi !
Ce n’était pas qu’il fût mauvais, le garde; mais il était tenu de mainteneur de l’ordre public, et c’était cela qui mettait tant de rudesse dans sa voix de brave homme et dans son geste péremptoire. Il ne bougea pas d’une semelle que les autres, comme il disait, n’aient déguerpi. Il jeta alors les yeux autour de lui, comme pour prendre choses et gens à témoin qu’il avait fait tout son devoir, et sans faiblesse.
« Personne, se dit-il avec une nuance de regret, personne ne m’a entendu ! »
Il se trompait. Un chien l’avait entendu, un chat aussi et puis, puisqu’il faut tout vous dire, sous un hangar voisin, une chouette. Un chien qui lui cria en son jargon : « N’êtes-vous pas honteux d’envoyer ces gens dans la montagne par ce soir de Noël, dans la solitude et le froid ! Ce n’est pas un temps à mettre un chien dehors ! » Un chat qui lui cria en son langage : « C’est abominable, Messire le garde, d’avoir si peu de sentiments humains en une nuit où pourtant le Dieu que vous adorez a répandu de la chaleur de son cœur sur les hommes, pour réchauffer le leur ! » Une chouette qui, emmitouflée jusqu’aux yeux dans ses plumes, hulula son indignation dans la solitude de son hangar : « Sont-ce cela les hommes ? Aussi implacables qu’une buse qui joue avec une souris, et cela la nuit où leur sauveur est né »
Mais le chien, le chat et la chouette ayant exprimé leurs sentiments en leur langage particulier, le garde qui n’y entendait rien, n’en pu tirer profit. Et ce fut bien dommage, car il put s’éloigner, avec une bonne conscience.

Ils se retournèrent encore une fois pour regarder disparaître la ville
Il ne rentra chez lui que tard, très tard. Il avait fêté Noël à sa façon, en inspectant les deux ou trois auberges du village, pour vérifier si le vin y était bon. Quand il rentra, le silence régnait partout. Il se sentit heureux. « Paix sur la terre ! » dit-il en écho à une parole qu’il avait entendue quelque part, il ne savait plus où. Mais il se trompait. Il ne pouvait y avoir de paix sur la terre, pas en tout cas pour tout le monde. S’il avait su quel complot s’était tramé dans les cours, venelles, hangars et greniers du village, il ne serait pas entré chez lui en sifflotant : « Minuit ! Chrétiens… » comme il faisait.
Il commença à être étonné quand, ayant fermé la porte derrière lui, il n’aperçut pas sur le coin de la table son assiette, et le plat, et le pain. Catherine avait-elle oublié ?
Catherine était la femme de ménage qui s’occupait aussi de la cuisine. Le feu était éteint. Pas de ragoût à mijoter doucement en l’attendant. Pestant contre cette manie qu’a tout le monde, maintenant, de réveillonner, ce qui expliquait évidemment que Catherine ait manqué à ses devoirs, il alla à l’armoire. Il avait faim. Pas la moindre trace de jambon, de lard, rien des restes du repas de midi, pas la plus petite croûte de pain. Rien ! Que c’était donc là quelque chose d’insolite et d’inexplicable !
Il était furieux : on l’eût été à moins, même sans être garde. Et qui accuser ? L’homme d’autorité se sentait atteint dans sa dignité même. Si seulement il avait eu l’idée d’aller jeter un coup d’œil dans la pièce voisine ! Il aurait vu une demi-douzaine de chats qui se pourléchaient les babines en clignant – parfaitement – de l’œil.
Il saisit sa lanterne. Il ferait se lever quelqu’un dans le village. Il ne pouvait tout de même pas aller se coucher sans souper ! Il remit son casque, sa lourde casaque…Que la nuit était donc noire ! De lune point. Etait-elle du complot ? la seule lumière de tout l’univers qui l’enveloppait lui pendait au bout du bras.
Il fit quelques pas sur la route et s’arrêta. Devant lui, au ras du sol, deux yeux brillaient. Que dis-je, deux yeux : vingt paires d’yeux, cent paires d’yeux, un firmament d’yeux de chats en lesquels brûlait une flamme ardente, une flamme de colère. Et quel bruit soudain, quel tintamarre ! Ce n’était pas un miaulement, mais un crachement ! On eût dit la nature entière lui affichant son mépris ! face à l’homme qui commençait à s’affoler, un mur de feu et une insulte inarticulée, volumineuse, véhémente, en tempête ! Il était devant une manifestation de la justice immanente, et ne le savait pas encore.
Il se retourna brusquement avec le dessein de regagner sa demeure. Halte-là ! Son poil se hérissa. Comme à un signal, un grognement féroce venait d’éclater qui se prolongea, s’étendit, s’allongea, s’épaissit en profondeur. Il éleva sa lanterne ou se consumait de l’huile de baleine à bout de bras : devant lui un front mouvant de crocs étincelants, de langues pendantes, d’oreilles furieusement dressées. Tous les chiens du village étaient présents au rendez-vous de minuit. Il n’en manquait pas un, pas même le sien.
Le garde soupçonna une farce. Comment une telle chose était-elle possible en une nuit comme celle-ci ? Il prit conscience tout d’un coup d’un grave danger : les crocs avançaient. Les aboiements se faisaient plus rauques, mais sur tous les tons, montant de la basse profonde au soprano aigu. Jamais fanfare guerrière n’avait été aussi magnifiquement nourrie. Qu’allait-il faire ?
Une gifle le fit sursauter. Comment, on osait ? On osait, et de quelle manière ! A la fois vigoureuse, moelleuse, duveteuse, gifles de chouette, s’il fallait croire le hululement prolongé qui peuplait la nuit, à hauteur d’homme. Toutes les ailes poussiéreuses des greniers et hangars du pays s’agitaient autour de lui, ailes silencieuses, sournoises ; et sans en avoir l’air, mine de rien, quels furieux coups de bec !
C’en était trop ! Avec un grand hurlement, ne sachant vraiment pas en quel chemin il s’engageait, le garde se mit à fuir comme un fou. Une immense acclamation avait répondu à son cri, mais il ne put jamais savoir si c’était une clameur de colère ou un énorme éclat de rire, ces bêtes ayant, au fond, un répertoire très particulier et assez restreint.
La belle fuite que ce fut là, à travers champs et jardins, fossés et talus ! Les chats lui couraient entre les jambes : cette gent est sournoise. Les chiens le harcelaient aux mollets. Quant aux chouettes, elles mirent le comble au grand désespoir et à la fureur de l’homme en fuite, en fouettant à grands coups d’ailes, aussi désobligeants que possible, et en faisant du coup voler au loin le casque, emblème malheureux d’une autorité bafouée. Alors, avec un grand cri, le garde culbuta dans un fossé embroussaillé. Il était au bout de son énergie.
Avait-il rêvé ? Un silence absolu s’était substitué à l’invraisemblable charivari de tout à l’heure. Il releva la tête. Il découvrit qu’il était affalé dans un champ de neige, près de grands sapins. Devant lui une lumière, puis une autre : un homme approchait, une lanterne à la main.
- Hé là ! Il y a quelqu’un ?
- Moi, grogna le garde. Mais il n’osa pas dire qui il était, assis dans la neige tout débraillé les habits tellement déchirés et sales qu’on aurait cru qu’il s’était vêtu de serpillières! Il venait de reconnaître, sous la lune qui brillait maintenant de fort réjouissante façon, la roulotte, et l’homme, et, à la fenêtre, un gentil visage de femme.
- Un vagabond ? Qui que vous soyez, vous êtres le bienvenu auprès de notre feu. C’est Noël.
Laissera-t-on dehors un pauvre type qui, sans doute, a froid et faim ? Entrez, brave homme !
Quand la porte de la roulotte se fut refermée derrière lui, le garde se trouva dans un petit intérieur plein de lumière et de chaleur. Dans le fond, la jeune femme lui souriait, serrant son petit enfant dans ses bras. Que peut faire un homme ayant tout simplement le sentiment d’avoir perdu, avec son couvre-chef, le signe extérieur de sa dignité, et aussi les signes intérieurs de ladite dignité, bonne conscience et respect de soi-même ? Il baissa les yeux et fit bien. Vraiment il était un vagabond, il en avait l’air et la chanson, et plus misérable que n’importe lequel de ceux qu’il avait dans le passé expulsés de la commune, au nom de l’ordre et de la décence.
- Monsieur, Madame, je vous prie de me pardonner…je vous dérange sans doute…
- Pas du tout ! Il ne faut pas fêter Noël dans la solitude, en égoïstes. On n’a pas de mérite à vous recevoir. Aujourd’hui le cœur est large, par nécessité. Il faut se mettre à la mesure du cœur, plus grand encore que tous les cœurs du monde réunis. José, donne un gobelet à Monsieur. Et puis il reste du boudin. Allez, vous allez être bientôt tout gaillard !
- Peut-être que vous ne savez pas qui je suis ?
- Ça n’a pas d’importance. Vous êtres l’hôte de notre petit bébé. Savez-vous bien que c’est la nuit de toute grâce ? L’enfant est le maître, et il n’a pas de mémoire. Faites donc comme chez vous.
- Et si je vous disais qui je suis ?
- Ne vous donnez pas cette peine, monsieur le garde; car on vous a bien reconnu, allez, bien que vous n’ayez pas votre casque…
- Si c’est comme ça…
Mais je vous jure qu’en mangeait son boudin, le garde champêtre pleurait. La loi fléchissait devant la grâce.
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